Dans un arrêt du 10 septembre 2025, la Cour de cassation modifie en profondeur sa jurisprudence sur le calcul des heures supplémentaires. Désormais, les jours de congés payés peuvent être pris en compte pour déterminer le seuil de déclenchement des heures supplémentaires, conformément au droit de l’Union européenne. Une décision majeure qui pourrait impacter la gestion du temps de travail dans de nombreuses entreprises françaises.
Le cadre juridique du calcul des heures supplémentaires en France
Pour rappel, en droit français, l’article L. 3121-28 du Code du travail définit comme heure supplémentaire toute heure de travail effectuée au-delà de la durée légale hebdomadaire. Le décompte des heures supplémentaires s’effectue exclusivement sur la base du temps de travail effectif, auquel peuvent s’ajouter, le cas échéant, certaines périodes expressément assimilées par la loi ou la jurisprudence à du temps de travail effectif.
Au sens de la Cour de cassation « les jours de congés payés, en l’absence de dispositions légales ou conventionnelles, ne peuvent être assimilés à du temps de travail effectif » (Cass soc 25 janvier 2017 n°15-20.692). Par conséquent, jusqu’à présent les jours de congés payés n’étaient pas pris en compte dans le calcul du seuil de déclenchement des heures supplémentaires.
Un revirement majeur et ses conséquences pour les salariés et employeurs
La Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence et s’aligne sur les exigences issues du droit de l’UE. Dans sa décision, elle écarte partiellement l’application de l’article L. 3121-28 du Code du travail et juge que, lorsqu’un salarié soumis à un décompte hebdomadaire de sa durée de travail est, au cours d’une semaine déterminée, partiellement en congés payés, il peut légitimement prétendre au bénéfice des majorations afférentes aux heures supplémentaires qu’il aurait perçues s’il avait effectivement accompli l’intégralité de son temps de travail.
En conséquence, désormais « le salarié soumis à un décompte hebdomadaire de sa durée de travail peut prétendre au paiement d’heures supplémentaires sur la semaine au cours de laquelle il a posé un jour de congé payé et n’a donc pas réalisé 35 heures de travail « effectif » ».
Les zones d’ombre et la suite législative attendue
La solution dégagée par la Cour de cassation soulève une question majeure : ce revirement jurisprudentiel s’applique-t-il aux 5 semaines de congés payés prévus par l’article L.3141-3 du Code du travail ou s’applique-t-il seulement aux 4 semaines de congés payés garanties par l’article 7 de la directive 2003/88/ CE du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail ? Qu’en est-il des congés payés conventionnels ?
L’étape suivante consiste à attendre la prise de position officielle du législateur, laquelle ne saurait s’exprimer qu’à travers une loi.
Nota bene : « la solution dégagée par la Cour de cassation reste circonscrite au décompte hebdomadaire de la durée du travail (…) et ne préjuge pas de la solution quant aux autres modes de décompte de la durée du travail (exemple : décompte mensuel, annuel) » (notice au rapport relative à l’arrêt du 10 septembre 2025 Pourvoi n°23-14.455 – Chambre sociale : 244ec98728734857d4007f62e29adc9b).
Source : Arrêt du 10 septembre 2025, n°23-14.455 la chambre sociale de la Cour de cassation (Arrêt_Congé_payé_heures_ supplémentaires.pdf)